Droit de préemption urbain (DPU) : quel est l’impact sur vos projets ?
- Qu’est-ce que le droit de préemption urbain (DPU) ?
- Quels biens sont concernés par le droit de préemption urbain (DPU) ?
- Quels biens ou opérations sont exclus du droit de préemption urbain (DPU) ?
- Quelle est la procédure en cas de droit de préemption urbain (DPU) ?
- Quelles réponses possibles de la part de la commune ?
- Quel impact sur mes projets de travaux ? Nos conseils.
- Contestation d’un droit de préemption
- Que se passe-t-il si je n’informe pas la mairie de mon intention de vendre mon bien ?
Qu’est-ce que le droit de préemption urbain (DPU) ?
L’urbanisme est un domaine complexe dans lequel les notions juridiques se multiplient. Pour mieux vous illustrer ce qu’est le droit de préemption urbain (DPU), nous allons vous présenter un exemple.
Mathilde et Julien avaient un terrain dans lequel ils voulaient construire leur maison. Ils ont appris par la suite qu’un sursis à statuer avais été mis en place. Ceci dû au fait que la commune révisait son document d’urbanisme (PLU, PLUi, PSMV, POS, Carte communale). Ce qui signifie que l’instruction d’autorisation d’urbanisme (permis de construire, déclaration préalable, permis d’aménager ou de démolir), est suspendue pendant 2 ans.
Autant dire que la maison de Mathilde et Julien devra attendre !
A l’issue de la révision du PLU, la commune a prévu d’élargir la route qui passe en face de la parcelle du couple. De ce fait, le terrain de Julien et Mathilde s’est retrouvé en zone de préemption, donc soumis à un droit de préemption urbain (DPU).
Alors, cela veut dire que, si Mathilde et Julien décident de vendre ou de donner leur terrain, ils devront le proposer à leur commune avant tout autre acquéreur potentiel.
Concrètement, le droit de préemption urbain (DPU) désigne la priorité de la commune à acquérir des biens immobiliers. L’objectif est de mettre en place des projets et politiques de développement urbain ayant un intérêt général.
Le droit de préemption urbain (DPU) est inscrit dans le Code de l’urbanisme (Articles L211-1 à L211-7).
Attention : il ne s’agit pas d’une expropriation. Le DPU ne vous oblige pas à vendre votre bien. Avec l’expropriation vous n’aurez pas le choix.
Quels biens sont concernés par le droit de préemption urbain (DPU) ?
Le droit de préemption s’applique sur les biens immobiliers, mais aussi sur certaines opérations à réaliser sur ces derniers.
Il concerne donc :
- la vente ou la donation de tout bien immobilier*, donc des terrains, des maisons, des appartements et des copropriétés.
- les cessions de droits indivis** portant sur un immeuble ou une partie d’immeuble.
- la cession de la majorité des parts d’une société civile immobilière (SCI). Sauf s’il s’agit d’une SCI familiale (constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu’au quatrième degré inclus).
- et enfin, les immeubles construits ou acquis par les organismes HLM.
* Un bien immobilier est considéré comme tout bien qui ne peut pas se déplacer.
** Un droit indivis signifie que le bien appartient à plusieurs personnes. Vous trouverez plus d’information à ce sujet dans le chapitre VII du Code civil (articles 815 à 815-18).
Quels biens ou opérations sont exclus du droit de préemption urbain (DPU) ?
Sont exclus du droit de préemption urbain :
- La donation ou la vente d’un ou plusieurs lots de bâtiments en copropriété à usage d’habitation, professionnel ou les deux. Le règlement de copropriété doit dater d’au moins 10 ans. La date de publication du règlement est le point de départ de ce délai.
- La vente ou donation d’un bâtiment pendant une période de 4 ans à compter de son achèvement.
- Les donations entre les membres de la même famille jusqu’au sixième degré et entre couples liés par le mariage ou le Pacte civil de solidarité – PACS.
- Les biens non soumis au droit de préemption sont listés dans l’article L213-1 du Code de l’urbanisme.
Néanmoins, ces exceptions peuvent aussi faire l’objet d’un droit de préemption si la commune décide par délibération motivée d’appliquer un DPU. Il s’agit dans ce cas d’un DPU renforcé.
Quelle est la procédure en cas de droit de préemption urbain (DPU) ?
En suivant notre exemple, Julien et Mathilde ont la possibilité de proposer leur terrain à leur commune pour qu’elle l’achète. Pour cela, il faut :
- Remplir le formulaire « Cerfa 10072*02 : Déclaration d’intention d’aliéner ou demande d’acquisition d’un bien soumis à un droit de préemption». Indiquer le prix souhaité au m², les caractéristiques du bien, les modalités de cession et de paiement.
- Adresser la « Déclaration d’intention d’aliéner (DIA) » à la mairie. Ceci par courrier recommandé avec avis de réception en 4 exemplaires. Il est possible de le faire en main propre contre décharge, ou par voie électronique si la mairie dispose d’une adresse mail dédiée.
- Attendre deux mois ! c’est le délai dont dispose la mairie pour donner une réponse.
- Pendant ce temps, la mairie peut demander des informations complémentaires. Celles-ci sont listées dans l’article Article R213-7 du Code de l’urbanisme. La demande de pièces complémentaires a pour effet de suspendre le délai de deux mois initiaux.
- La mairie peut demander par écrit de venir visiter le bien (Article D213-13-2 du Code de l’urbanisme). Dans ce cas, Julien et Mathilde ont 8 jours pour donner une réponse. S’ils acceptent, la visite se réalisera dans les 15 jours Calendaires (hors week-ends et jours fériés) suivant la date d’acceptation de la visite. Ils peuvent refuser la visite et le délai reprend normalement.
- La mairie prend une décision ou refuse d’exercer son droit (son silence vaut renonciation). La décision est publiée en mairie et notifiée aux intéressés.
Bon à savoir :
– l’article L102-8 du Code des relations entre le public et l’administration – CRPA impose la saisie par voie électronique (SVE) à toutes les communes à partir de janvier 2022.
– Sachez aussi que la déclaration d’intention d’aliéner (DIA) peut se faire par un notaire.
Quelles réponses possibles de la part de la commune ?
La mairie a 3 possibles réponses à donner :
- Elle accepte avec les conditions que vous avez demandées. Dans ce cas, la mairie a 4 mois pour établir l’acte authentique de vente et vous payer. En l’absence de paiement, vous êtes libre de vendre votre bien à un autre acquéreur au prix marqué dans le DIA.
- Elle vous achète votre bien mais à un autre prix. Soit, vous êtes d’accord avec la contre-proposition et vous vendez (vous avez 2 mois pour réfléchir). Soit la mairie saisie le tribunal de grande instance (TGI) pour qu’il fixe le prix. Vous pouvez tout de même renoncer à la vente de votre bien. Il suffit de ne pas répondre ou d’informer par écrit. Si la mairie renonce à la procédure, elle perd son droit pendant 5 ans. Alors, vous pouvez vendre à un autre acquéreur mais au prix fixé par le tribunal.
- Elle refuse d’exercer son droit. Par contre, si la mairie ne vous répond pas dans les deux mois, silence vaut renonciation à son droit de préemption. Dans ce cas, vous pouvez vendre votre bien à un autre acquéreur au prix marqué dans le DIA. Si vous ne vendez pas votre bien au bout de 3 ans, vous serez obligé de refaire une DIA.
Quel impact sur mes projets de travaux ? Nos conseils.
Cette situation est très contraignante. C’est pourquoi avant de vous lancer dans des projets immobiliers, renseignez-vous sur la situation juridique du bien.
Demandez un certificat d’urbanisme d’information (CUa) pour connaitre les règles d’urbanisme et les taxes applicables. Le CU est surtout intéressant pour connaitre les limitations au droit de propriété, dont le droit de préemption urbain (DPU).
Si vous avez un projet concret, demandez un certificat d’urbanisme opérationnel (CUb) qui vous informera davantage sur la faisabilité de votre projet. Il renseigne aussi sur l’état des voiries et des réseaux publics existants ou futurs.
Tenez-vous au courant des avancements en matière de règlementation urbaine de votre commune. Dès la suspicion d’un droit de préemption, rapprochez-vous de votre commune. Cela vous permettra de mieux comprendre la situation et de vous faire écouter avant que ce soit trop tard. Négocier peut-être possible !
Comme nous l’avons dit, vous n’êtes pas obligé de vendre ou partir de votre bien. Par contre, vous ne pourrez pas vendre à un autre acheteur que votre commune sauf si celle-ci renonce à son droit. Donc, tous les projets et travaux que vous avez en tête doivent être réfléchis en fonction de ces circonstances. Si la commune veut votre bien, il y a des chances qu’elle l’ait.
Demandez votre certificat d’urbanisme
Contestation d’un droit de préemption
Vous pouvez contester la préemption devant le Tribunal administratif. Cependant, démontrer que la décision de votre commune n’obéit pas à l’intérêt général reste compliqué.
Pour information, les actions ou opérations d’aménagement pour lesquels la commune peut établir un droit de préemption sont :
« un projet urbain, une politique locale de l’habitat, d’organiser le maintien, l’extension ou l’accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de recherche ou d’enseignement supérieur, de lutter contre l’insalubrité et l’habitat indigne ou dangereux, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. » (Article L300-1 du Code de l’urbanisme).
Vous l’avez compris, beaucoup de projets rentrent dans ces conditions !
Toutefois, soyez attentifs aux délais et aux erreurs de procédure, c’est peut-être le moyen le plus sur de contester le droit de préemption de la mairie.
Que se passe-t-il si je n’informe pas la mairie de mon intention de vendre mon bien ?
Si vous voulez vendre un bien soumis au DPU, vous êtes obligé de faire la déclaration d’intention d’aliéner (DIA). Si vous avez oublié de le faire, votre vente est nulle. La prescription est de 5 ans. Pendant ce temps, la commune pourrait exercer son droit.
N’oubliez pas, la meilleure manière d’éviter les surprises est de se tenir informé. Demandez des renseignements à votre commune sur la situation juridique de vos biens.